Le masque mortuaire d'Agamemnon

Le masque d'Agamemnon, baptisé ainsi au moment de sa découverte n'est en rien lié à l'un des héros de la Guerre de Troie, le chef des Achéen Agamemnon. En fait, son authenticité en tant que pièce archéologique a été très rapidement mise en doute : ce masque mortuaire en or a été découvert par l'archéologue Heinrich Schliemann, qui croyait ou prétendait croire que cet objet aurait couvert le visage du roi Agamemnon au moment de son inhumation, hypothèse depuis lors largement réfutée.

Ce masque est-il vraiment un artefact du 16ème siècle avant notre ère, s'agit-il d'une pièce originale qui a ensuité été modifiée par H. Schliemann afin de servir ses intérêts, ou bien sommes-nous en présence de ce que l'on appelle un faux moderne, c'est-à-dire d'un objet entièrement conçu en 1876 et placé ensuite dans la tombe aux côtés des autres masques mortuaires afin de faire croire qu'il date de la même époque ?

masque d'agamemnon
Masque d'Agamemnon en or, exposé au Musée national archéologique d'Athènes.

Localisation et description de la découverte

  • Nature de la découverte : Masque funéraire.
  • Localisation : Mycènes, au nord-est de l'actuelle Grèce, dans la région appelée Péloponnèse. Le masque aurait été trouvé aux côtés d'un autre masque dans une sépulture de type tombe à fosse, à proximité immédiate de 5 autres sépultures. Cette tombe est identifiée comme la tombe V du cercle A, située à l'intérieur des murs d'enceinte de la ville, dans l'acropole.
  • Datation : Le masque aurait été façonné autour de 1500 à 1550 av. J.-C., mais cette hypothèse n'a pas été totalement validée scientifiquement. Des doutes subsistent sur son authenticité.
  • Dimensions de l'objet : 25,5 cm (hauteur) X 28 cm (largeur).
  • Caractéristiques de la sépulture : Il s'agit de 6 tombes à fosse creusées dans la terre profondément, et entourées d'un cerche de dalles dressées d'un diamètre de 27,5 m.
  • Contenu de la tombe : De petites figurines de terre cuites, 5 masques funéraires en or, des bijoux, des parures, des vases et de nombreux objets en or, les ossements incomplets de plusieurs dignitaires de haut rang, des armes, des céramiques.
  • Date de la découverte : Le masque aurait été découvert le 30 novembre 1876, tandis que les fouilles de la zone ont duré du 7 août au 3 décembre 1876.
  • Identité de l'archéologue : Heinrich Schliemann.
  • Lieu d'exposition : Musée national d'archéologie d'Athènes.

À propos du masque d'or

Ce masque, si c'est un original, daterait donc du 16ème siècle avant notre ère, époque à laquelle les mycéniens étaient établis dans cette région de l'actuelle Grèce. À cette date, la guerre de Troie qu'Homère évoque dans son Iliade n'a pas encore eu lieu, et ne surviendra que plusieurs siècles plus tard, autour du 11ème ou 12ème siècle av. J.-C.

Ce masque ne peut donc pas être, selon toute vraisemblance, celui d'Agamemnon, chef des Achéens et l'un des héros grecs apparaissant dans l'épopée d'Homère. Néanmoins, la confusion survenue lors de sa découverte lui ont valu d'être resté connu sous ce nom, alors que le masque d'or couvrait certainement le visage d'un roi ou d'un chef de guerre mycénien.

tombes de Mycènes, à l'intérieur de la cité
Représentation des tombes du cercle A, derrière les remparts de Mycènes.

Voici, reconstitutée à partir des ruines retrouvées, une représentatio de la partie de la cité mycéenne où se situait les tombes du Cercle A, parmi lesquelles celle où les masques ont été découverts.

Sa facture étonne, parce qu'elle ne correspond à celles des masques trouvés dans les autres sépultures. C'est d'ailleurs ce qui a d'abord suscité la suspicion dans l'esprit des scientifiques.

Controverse autour de la découverte

Les chercheurs actuels sont unanimes sur la réputation de l'archéologue allemand Heinrich Schliemann : il s'agit d'un personnage caractérisé par la mythomanie, et qui préfère à la rigueur scientifique des découvertes spectaculaires ainsi qu'une certaine complaisance envers l'empereur Guillaume 1er, dont il aurait pu tenter de flatter l'ego en mettant au jour un faux masque ressemblant à l'empereur allemand.

Les doutes des scientifiques concernant l'originalité du masque s'appuient sur plusieurs points, parmi lesquels :

Plusieurs versions s'affrontent autour de ce qui pourrait bien être une parfaite supercherie. Certains pensent que l'objet est authentique, mais qu'il a été modifié par H. Schliemann afin de ressembler à l'empereur de la Prusse ; d'autres pensent que l'objet est faux et qu'il pourrait avoir été fabriqué par un orfèvre (peut-être un proche de son épouse) puis placé dans la tombe afin de faire croire une découverte archéologique. Enfin, certains soutiennent que l'objet est authentique et qu'il n'a pas été modifié.

Un test chimique analysant l'alliage d'or employé pour la réalisation de ce masque permettrait de lever définitivement le doute, du moins sur l'authenticité de l'objet, simplement en procédant à une datation. Cependant, le Musée national archéologique d'Athènes s'oppose à cette expérience scientifique, ce qui empêche.

Symbolique des masques mortuaires

Retrouvés parmi des ossements incomplets, ces masques mortuaires en or ont une valeur symbolique particulière. L'utilisation de l'or montre l'intention de fournir une représentation qui soit aussi immuable et inaltérable que peut l'être le métal jaune. Dans un contexte funéraire, ce matériau a une importance capitale : il s'agit en effet autant de montrer la richesse du dignitaire inhumé que de permettre à ce dernier de bénéficier d'une ultime représentation de son visage censée traverser le temps.

Autre masque funéraire

masque de toutânkhamon Toutes proportions gardées, on peut rapprocher cette pratique de celles réservées aux sépultures des pharaons, dans lesquelles les visages des défunts étaient également représentés de manière idéalisée, avec des matériaux nobles et choisis pour inaltérabilité.

Tout comme le masque funéraire de Toutânkhamon, mais sans rivaliser avec le degré de sophistication atteint par les Égyptiens dans leurs pratiques funéraires (embaumement, tombes aux parois finement ouvragées, sarcophages finement ciselés, mobilier destiné à accompagner le mort) ces masques couvrent pourtant bien le visage que l'être humain enterré va présenter à la mort : en savoir plus.