Entre les pierres anciennes de deux châteaux et le souffle discret des toiles peintes, une légende du cinéma français a choisi de fermer son dernier acte. À 101 ans, cette actrice, dont le regard a capturé des générations, s’est éteinte le 21 février 2024, laissant derrière elle un héritage sculpté par la pellicule et les César. Son histoire, tissée de silences et de lumière, résonne dans cet Ephad où l’art efface le temps.
Une icône du cinéma français face au temps et à l’art
Née le 22 août 1922, Micheline Presle incarne un siècle de jeu subtil, marquant chaque rôle d’une élégance intemporelle. Son regard bleu, signature d’un art sans éclat, traverse les décennies grâce à des films comme Falbalas ou Le Diable au corps. En 2004, un César d’honneur consacre une trajectoire exceptionnelle, symbole d’une reconnaissance éternelle.
Avec sa fille Tonie Marshall, réalisatrice disparue en 2020, elle prolonge sa passion jusqu’en 2014 via Tu veux ou tu veux pas. Leur collaboration, née après le divorce de Gérard William Marshall, scelle une complicité artistique rare. Malgré la perte de Tonie, l’œuvre commune reste un pilier de sa fin de vie.
De Vénus Beauté (Institut) à France Boutique, ses personnages nuancés renforcent son statut d’icône. Le cinéma français perd ici une voix discrète mais essentielle, dont l’influence inspire encore les nouvelles générations. Chaque film, chaque regard, raconte une histoire de résilience et de grâce.
Le cinéma français s’invite dans un havre créatif
Situé à Nogent-sur-Marne, l’Ephad Maison nationale des artistes abrite deux châteaux historiques du XVIIe et XVIIIe siècles. Classés monuments, ils s’élèvent dans un parc de dix hectares, héritage des sœurs Smith-Champion, artistes du début XXe siècle. Légués à l’État en 1944, ces lieux deviennent un refuge pour les créateurs en fin de parcours.
Avant cet exil paisible, Micheline Presle résidait à Haute-Isle, village troglodytique du Val-d’Oise. Ce choix reflète son attirance pour les lieux hors norme, où l’histoire se niche dans les pierres. Ici, chaque recoin murmure une histoire, comme l’église creusée dans la falaise, symbole d’une vie liée à l’exceptionnel.
Dans cet écrin, le cinéma français trouve un écho inattendu. Les murs, imprégnés de créativité depuis 1944, accueillent peintres et musiciens. Chaque résident contribue à une mémoire collective, où les films d’hier dialoguent avec les toiles d’aujourd’hui dans une symphonie silencieuse et vibrante.
Un refuge d’art qui prolonge une présence cinématographique
L’Ephad pulse au rythme des concerts, expositions et projections. Une académie de peinture et des pianos libres d’accès transforment le quotidien en aventure artistique. Les résidents, anciens comédiens ou sculpteurs, partagent leur savoir, tissant des liens autour de la création et de la mémoire collective.
Le 22 août, date de sa naissance, devient un hommage discret marqué par une projection de ses films cultes. Ce rituel apaise le souvenir de sa fille disparue, Tonie. Sans ostentation, chaque geste honore une vie dédiée à l’art, où le cinéma français reste une boussole intime et lumineuse.
Ici, les années ne pèsent pas. Les films projetés dans la salle de conférences raniment des souvenirs, tandis que les expositions célèbrent les œuvres des résidents. Ce cadre unique transforme la fin de vie en un dernier rôle, joué avec grâce et sérénité, où chaque instant célèbre l’éternité de la création.
L’héritage d’une légende qui inspire les générations futures
Entre les murs des châteaux Smith-Champion, l’esprit de Micheline Presle continue de vibrer à travers les rires partagés et les pinceaux levés. Les projections nocturnes et les toiles fraîches perpétuent une passion née il y a un siècle. Ce refuge, bien plus qu’un simple Ephad, célèbre l’éternelle jeunesse du cinéma français. Une leçon d’élégance et de résilience, offerte à ceux qui savent écouter le murmure des étoiles.