Vous venez de récupérer votre courrier et une enveloppe officielle d’Enedis attire votre attention. À l’intérieur, une demande de paiement surprise vous réclame une somme conséquente pour régulariser votre situation. Ce scénario se répète actuellement dans de nombreux foyers français, créant incompréhension et inquiétude. La généralisation du Compteur Linky s’accompagne en effet d’une vague de contrôles inédite qui transforme le quotidien de certains utilisateurs.
La riposte d’Enedis face à la fraude du Compteur Linky
D’après jeuxvideo.com, Enedis estime à 100 000 le nombre de Compteur Linky piratés depuis trois ans. Ces fraudes, organisées via des réseaux sociaux, utilisent des « shunts » détournant l’électricité avant comptage. Le préjudice dépasse les centaines de millions d’euros, pesant indirectement sur tous les consommateurs via le Tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (Turpe).
Bertrand Boutteau, responsable du programme Pertes et Fraude chez Enedis, souligne que cette fraude profite aux uns au détriment des autres. « L’électricité volée est payée par les honnêtes usagers », rappelle-t-il. Une réalité financière lourde de conséquences sociales, alors que le nombre de contrôles passe de 12 000 à 30 000 en 2025.
Face à l’ampleur du phénomène, Enedis accélère ses vérifications techniques. L’objectif : doubler les contrôles en un an pour sécuriser le réseau. Une stratégie logique, mais qui expose davantage de foyers à des erreurs de diagnostic, comme le déplore l’UFC-Que Choisir. La pression s’intensifie, au risque de piéger des ménages innocents.
Algorithmes et faux positifs : un risque accru pour les usagers
Enedis élargit désormais ses recherches aux cas « probables », là où auparavant, seules les fraudes avérées étaient ciblées. Cette approche augmente mécaniquement les faux positifs. Un simple écart de consommation ou un événement technique non expliqué déclenche alors une enquête, sans information claire pour le consommateur.
L’UFC-Que Choisir dénonce une inversion de la charge de la preuve concernant le Compteur Linky. « C’est désormais au client de prouver son innocence », alerte l’association. Or, sans détails sur les accusations, comment contester ? De nombreux usagers se heurtent à un mur face à des courriers laconiques et peu explicites.
Prenez l’exemple de Sylvain, 64 ans. Malgré une maison inhabitée pendant la période incriminée et des scellés intacts, il se voit réclamer 1 500 €. Même constaté par un technicien, la procédure suit son cours. Une situation ubuesque illustrant les limites du système face à des algorithmes parfois trop prompts à juger.
Compteur Linky : protéger les innocents tout en luttant contre la fraude
Marie-Isabelle et Hervé, dans l’Eure, reçoivent une facture de 1 359 € pour une « manipulation » datant du jour où leurs panneaux solaires ont été raccordés. Selon eux, un technicien Enedis n’a pas correctement replombé le Compteur Linky. Une erreur humaine transformée en accusation de fraude, révélant des failles dans la gestion des interventions.
Le Médiateur national de l’énergie constate une hausse des litiges, passant de 100 à près de 200 dossiers en un an. Bien que la majorité des fraudes soient avérées, les erreurs touchent des foyers déjà fragilisés par des montants exorbitants. Les données montrent que la présomption d’innocence peine à s’appliquer dans les faits.
Trouver un équilibre entre efficacité et justice reste crucial. Tandis qu’Enedis doit protéger le réseau, chaque accusé mérite une enquête rigoureuse. Sans quoi, la lutte contre la fraude risque de criminaliser des ménages honnêtes, minant la confiance dans un outil censé moderniser le réseau électrique.
Vers une régulation plus juste et transparente
Derrière chaque courrier réclamant, 1 359 € se cache une réalité complexe. Si la lutte contre la fraude est nécessaire, elle ne doit pas sacrifier la justice individuelle. Renforcer les contrôles tout en améliorant la transparence s’avère essentiel. Pour que le Compteur Linky reste un outil de progrès, et non une source d’inquiétude.